Centre d'accueil pour enfants orphelins

Dans la région de Pondichéry (district de Pondichéry et état du Tamil Nadu) un centre d'accueil pour enfants abandonnés a été créé en 1991 par une jeune indienne. Une première maison a été établie pour héberger des garçons dans les faubourgs de Pondichéry. En 2009, une deuxième maison a vu le jour pour accueillir des filles dans un village sis au milieu d’une campagne verdoyante. En 2018, un foyer pour enfants gitans, APRES HOME, est intégré au centre.
L’association française Les Orphelins de Pondichéry soutient ce centre depuis 2005.

samedi 31 août 2013

Une matinée chez Vazir

 













Le soleil tape déjà fort sur Pondichéry. Ce jour-là, nous avons rendez-vous chez Vazir pour récupérer les objets que nous lui avions commandés. Après un petit trajet dans un rickshaw piloté tel une voiture de formule 1 par son conducteur, nous arrivons à l’atelier de Vazir, auquel nous accédons  par un pas de porte remarquable d’équilibre, puis en escaladant un étroit escalier. 
Vazir avait dit de venir après 10 heures. En bonnes françaises, à 10 heures précises, nous sommes sur place. Dans l’atelier, pas de Vazir. Mais une voix se fait entendre dans la pénombre ; il s’agit d’un de ses employés qui propose d’aller prévenir son patron. Nous acceptons. Il se lève, cherche sa canne à tâtons et nous nous rendons  alors compte  avec stupeur que cet homme qui façonne les objets est aveugle. Malgré notre proposition d’attendre tranquillement dans l’atelier, il part chercher Vazir jouant des mains, de sa canne et de ses oreilles pour se guider dans la petite rue. Le temps s’écoule un peu ; la température continue à monter ; un petit rat se promène sur le mur de l’atelier ; nous sommes en Inde où nous avons eu le temps d’apprendre la patience. Ils arrivent : Vazir boitant, appuyé solidement sur l’épaule de son ouvrier qui ouvre la marche de son pas prudent d’aveugle. Le travail peut commencer. C’est d’abord un petit thé bien sucré et un coup de téléphone à une employée de Vazir qui doit venir emballer les objets.

En attendant, Vazir nous raconte sa vie.
Vazir a été touché par la lèpre à 14 ans alors qu’il était écolier.
Guéri, il a appris la technique du papier mâché et a travaillé dans un atelier de réhabilitation des lépreux à Pondichéry. À 65 ans, la retraite est venue. Sans ressource, sans famille, Vazir a alors monté son propre atelier d’objets en papier mâché. En janvier 2012, le cyclone Thane a dévasté son lieu de travail. Avec l’aide d’amis français et de la directrice de Vudhavi Karangal, il a reconstruit l’atelier. Par ce travail, Vazir fait vivre quatre personnes : l’homme que nous avons déjà rencontré, aveugle, ancien lépreux qui façonne les objets et trois femmes qui les peignent et les polissent.
À l’atelier de Vazir, on fabrique des magnets, mais aussi des petites statuettes. Chaque objet est unique : moulé, peint à la main, emballé soigneusement. Les couleurs sont franches, les traits des personnages ou des animaux sont délicats, le résultat est magnifique.

 Vazir a 74 ans.



jeudi 15 août 2013

Retour de l’école à la maison des garçons


Ce jour-là, Alice et Maran nous emmènent à la maison des garçons. Nous visitons l’atelier inauguré en 2012 et financé par l’association Les Orphelins de Pondichéry de Voujeaucourt. 
L’atelier se remplit : un établi complet et bien garni, plusieurs machines sur lesquelles les enfants s’exercent pour apprendre des rudiments de mécanique et d’électricité. Le souhait d’Alice est de les rendre capable de réparer et maintenir les équipements dans leur vie quotidienne. Nous admirons la nouvelle presse qui va permettre à Alice de restaurer à moindre coût les livres et cahiers qui ont souvent une vie difficile dans les bras des gamins chahuteurs.


Une idée sympathique de Maran : les fenêtres de l’atelier sont protégées par de grandes volières où perruches et autres oiseaux mul-ticolores nous ont fait un concert de pépiements. Mais il est 16h30. On entend du bruit. Les enfants rentrent de l’école. Et aujourd’hui, on ne plaisante pas ; c’est inspection générale des sacs d’école. Les enfants arrivent par petits groupes. Dans chaque groupe, les enfants vident leur sac devant un grand, responsable du groupe. L’inventaire commence et c’est dur pour les petits. On voit écarter tous les trésors qu’ils ont accumulés depuis la dernière inspection : qui une image de Mickey, qui, un clou, qui, un peigne cassé … un petit journal, un poème d’amour, une petite batterie cassée, …
Pourquoi les priver de ces petits trésors ? demandons-nous à Alice. Avec un sourire Alice explique qu’elle ne veut pas que les enfants soient tentés à l’école d’échanger des objets, d’accepter des cadeaux de leurs copains plus favorisés voire de chaparder ce qu’ils convoitent. Elle ne les prive de rien et s’ils ont besoin, il suffit qu’ils lui demandent. C’est pour elle une règle de vie qu’elle inculque aux enfants et la garantie que ceux-ci ne seront pas à l’extérieur accusés de vol. L’inspection des sacs n’est pas terminée. Il faut encore exhiber plat et gobelet que chaque enfant transporte avec lui pour le repas de midi. Attention, ceux-ci doivent porter la marque de Vudhavi Karangal sinon, il faut fournir des explications convaincantes à Alice et ça, en la regardant droit dans les yeux ; il ne faut pas bégayer, il faut dire ce qui s’est passé !
Vient ensuite le contrôle de l’état des uniformes scolaires et gare au garçon batailleur qui aura déchiré sa chemise dans une discussion musclée avec ses copains dans la cour de l’école. Toute cette séance se termine par la présentation par chaque chef de groupe des affaires de toilette, elles aussi frappées du sceau de l’orphelinat : savon dans sa boîte, brosse, récipients pour se doucher, etc.
Tout finit bien. Pas de rancune. Les enfants s’égayent dans la cour avec soulagement : certains s’en sont tirés avec une remontrance d’Alice, remontrance qui finit par s’effacer derrière un sourire ; d’autres, plus soigneux (ou plus chanceux) ont été félicités.


Françoise Simonot-Lion - Agnès Volpi - août 2013





La maison des filles à Palayam


C’est dans le petit village de Palayam, niché au milieu des rizières que se situe la maison des filles. C’est une vieille maison traditionnelle qui s’organise autour d’un patio débordant de plantes vertes.
Les petites sont rentrées de l’école, nous croisons la professeure de musique qui vient de terminer sa leçon. Les filles chantent sous la direction de l’une d’entre elles : mouvement des bras marquant le rythme, yeux brillants, sourires, magie de la musique. Cours de chants, de veena, leçons de danse,  pratique du yoga sont au programme pour les 50 filles qui sont hébergées à Palayam. Pour Alice, ce sont des activités indispensables à un développement équilibré des filles. À la fin de notre séjour, nous avons d’ailleurs été conviées à un spectacle de danse donné par des filles souriantes, chatoyantes dans leurs costumes colorés et parfaitement bollywoodiennes.
Les grandes arrivent de leur école privée de Pondichéry. Les choses sont sérieuses et, pour elles, les journées sont longues. Elles sont 5 en cycle pré-universitaire se destinant à des carrières dans le commerce ou dans la santé. Alice est fière d’elles et elle se bat pour réunir les fonds afin de leur préparer un futur où elles puissent trouver leur place dans la société indienne avec bonheur, équilibre, autonomie. C’est un beau projet pour lequel l’antenne de Nancy souhaite se battre aux cotés d’Alice.

Derrière la maison, nous voyons un rêve qui sort de terre. Les fondations de l’atelier de couture sont terminées. Une allée est tracée pour que les femmes du village aient accès à l’atelier de manière indépendante. Alice a déjà mis une option pour un lot de briques au moment où leur cours était le plus bas et elle a trouvé à Chennai des portes et des fenêtres à un tarif raisonnable. Avec l’aide d’Adonis Mathurin qui va faire participer l’association de Montbéliard à hauteur de la moitié de la somme, nous avons fait parvenir à l’orphelinat 6000 € cet automne pour démarrer au plus tôt le bâtiment lui-même (murs, escalier, toilettes). Il restera l’an prochain à poser une dalle pour le toit et terminer électricité, plomberie, peinture, etc.
La maison, elle-même continue à s’aménager. Des lits supplémentaires ont été acquis, les murs ont été peints de couleurs vives, la cuisine extérieure est terminée et complétement opérationnelle. La rentrée à l’école des petites a pu se faire en bonne partie grâce à la générosité des donateurs de l’association. Alice jongle avec son budget pour fournir chaque jour repas, vêtements, soins aux enfants, et ce, dans une situation économique très difficile pour l’Inde actuellement ; nous avons vécu en direct la dévaluation de la roupie indienne pendant le mois d’août (le taux pour un Euro était de 75 roupies en début et de 92 en fin de mois)
 
En sortant, nous découvrons, dans la rue, apposée sur le mur de la maison, une boîte aux lettres. C’est une marque de la générosité d’Alice et de Maran. Palayam n’a pas de poste ; pour aider les villageois, Alice a installé dans l’entrée de la maison une table proche d’une fenêtre donnant sur l’extérieur, une chaise, une petite armoire ; c’est là que réside dorénavant le bureau de poste du village.


 



Françoise Simonot-Lion, Agnès Volpi - août 2013