Centre d'accueil pour enfants orphelins

Dans la région de Pondichéry (district de Pondichéry et état du Tamil Nadu) un centre d'accueil pour enfants abandonnés a été créé en 1991 par une jeune indienne. Une première maison a été établie pour héberger des garçons dans les faubourgs de Pondichéry. En 2009, une deuxième maison a vu le jour pour accueillir des filles dans un village sis au milieu d’une campagne verdoyante. En 2018, un foyer pour enfants gitans, APRES HOME, est intégré au centre.
L’association française Les Orphelins de Pondichéry soutient ce centre depuis 2005.

samedi 20 février 2016

Février 2016 – Après les inondations, la vie reprend à Vudhavi Karangal


Arrivés à Pondichéry la veille, encore tout frémissants de la chaleur qui nous sort de notre hiver français, nous prenons le chemin de Mahatma Gandhi Road pour rendre visite à Alice et Maran. Dans nos poches, près de 2800 € pour les aider à remettre en état la maison des garçons après les inondations qui ont frappé le nord du Tamil Nadu et en particulier tout le territoire de Pondichéry à la fin décembre.
En cette fin d’année 2015, des pluies torrentielles s’abattent sur la région. La ville de Chennai est cernée par les eaux. De nombreux villages sont sinistrés, l’eau traverse les toits, détruit les murs, pénètre dans les maisons. Pour sauver les villages en amont de la rivière Gingee, les autorités ouvrent les barrages en amont de Nonankuppam provoquant la montée des eaux jusqu’à l’embouchure de la rivière qui borde l’orphelinat. À ce déluge tombant du ciel s’ajoute en une nuit la crue de la rivière qui rapidement envahit la cour de la maison des garçons. Alice et Maran, appelés d’urgence pendant la nuit, arrivent sur place immédiatement et trouvent un quartier submergé par l’eau. Ils gagnent à pied la maison des garçons, dans un fleuve de boue qui leur arrive à la taille. Impuissants devant cette eau boueuse qui continue à monter, ils voient l’eau arriver 3 marches avant le réfectoire, puis entrer dans la cuisine juste avant que le niveau ne commence à baisser. Alice et Maran restent jusqu’au matin en attendant que la situation se stabilise. C’est alors l’heure des premiers constats qui ne laissent guère de place au découragement. Immédiatement, il faut mettre sur pied un plan d’action d'urgence afin de sauver ce qui pouvait l’être et surtout préserver les enfants. Les toilettes ont été épargnées de justesse, les dortoirs, la salle à manger et l’atelier n’ont pas été touchés. Par contre, le préau a été submergé et tout ce qu’il contenait est devenu inutilisable (fournitures scolaires, livres, meubles, etc.) Les instruments à percussion utilisés dans la musique carnatique ont été gravement endommagés par l’humidité et doivent être remplacés. En se retirant, l’eau a laissé derrière elle dans la cour une mare de boue qu’il faut évacuer. Pendant 15 jours, il n’y a pas eu d’eau potable dans la maison, ce qui signifie pas de possibilité de faire la cuisine ni de se laver. Alice fait alors appel à d’autres associations pour les repas et la livraison d’eau potable. Les enfants ne peuvent pas aller à l’école durant ces deux semaines et Alice, en plus de la logistique à mettre en place, des enfants à soigner (5 cas de dengue), a le souci d’occuper les garçons pour leur maintenir une vie aussi normale et aussi structurée que possible (jeux, musique, etc.).
Lors de notre visite en février, la vie avait repris son cours normal et les enfants avaient réintégré l’école. Comme toujours Alice et Maran ont fait face avec efficacité et courage à la situation ; ils en tirent des leçons et étudient actuellement comment protéger la maison de tels problèmes qui, hélas, ne sont pas rares dans cette partie du monde ; ils prévoient notamment de reconstruire rapidement le mur qui sépare le terrain sur lequel se trouve la maison des garçons de la berge de la rivière en creusant, cette fois, des fondations profondes ; la réfection prochaine de la chaussée est programmée par la municipalité et sera complétée au niveau de la maison des garçons par une surélévation de la voirie formant une sorte de dos d'âne au niveau du portail d'entrée, ceci afin de freiner les écoulements lors d'une prochaine crue,
Les inondations en Inde ne sont pas rares. Le changement climatique frappe aussi ce pays : sécheresse catastrophique dans le sud l’Inde, cours d’eau à sec, paysans endettés, moussons irrégulières, et ponctuellement cyclones (souvenons-nous de Thane qui a soufflé sur Pondichéry en 2011 en faisant d’importants dégâts) et pluies torrentielles et meurtrières comme en fin 2015. Une urbanisation mal ou non contrôlée, des réseaux d’assainissement sous dimensionnés, des constructions trop proches  des rivières, tout ceci contribue aussi à la fragilité d’un écosystème déjà soumis à des conditions climatiques  chaotiques.

Françoise Simonot-Lion, Matthieu de Lamarzelle

mercredi 10 février 2016

Mais où est donc passée Lakshmi ?

Lakshmi est l’éléphante du temple Manakula Vinayagar de Pondichéry. Tous les jours, ponctuellement, à 5 heures de l’après-midi, elle sort de sa sieste et arrive, d’un pas royal, afin de prendre place devant l’entrée du temple pour le bonheur des dévots aussi bien que des touristes. Elle reçoit, d’une trompe digne les offrandes (bananes, herbes, roupies), puis d’un mouvement gracieux, enfourne herbes et bananes dans sa gueule ou dépose les roupies dans la main de son mahout. Enfin, avec une certaine componction, elle pose sa trompe, bénédiction suprême, sur la tête du généreux donateur. Oui, je l’avoue, j’aime les éléphants, ces grosses bêtes grises aux petits yeux brillants ; j’aime Lakshmi. Je lui confie toutes mes pièces de une ou deux roupies et à chaque fois,  sans se lasser,  elle me fait la grâce de me bénir d’un coup de trompe gracieux, léger mais néanmoins ferme. Cette année encore, dès mon arrivée, je cours au temple et, là, surprise, point de Lakshmi. Serait-elle en retard ? ou pire, serait-elle malade ? ça lui est déjà arrivé. J’imagine le pire …


Lakshmi, c’est une célébrité à Pondichéry ; ici, tous les jours, on la
décore, on la fait belle, on lui met des bijoux ; le jour de l’indépendance, elle arbore, en guise de maquillage, un drapeau indien peint sur son front. Où est-elle donc passée ?
J’interroge fébrilement des Pondichériens. Et bien, figurez-vous, que Lakshmi est en vacances. Elle le mérite, certes, mais je trouve un peu léger qu’elle l’ait fait alors que j’avais, moi, parcouru près de 10 000 km pour la voir. Lakshmi est en vadrouille donc. Elle est partie retrouver tous ses copains et copines éléphants sacrés des temples du Tamil Nadu, dans un camp de vacances au milieu d’une forêt kéralaise pour une cure de remise en forme. Ils sont tous là-bas avec un pro-gramme d’enfer. Loin de la pollution de la ville, ils se ressourcent. Et, comme dans toute bonne cure, on leur fait un check-up médical. Ils ont droit à une nourriture équilibrée.

Maintenant, c’est menus diététiques et horaires de repas réguliers. Terminé, le grignotage de bananes à toute heure du jour ! Le matin, c’est école pour étudier les nouveautés du métier d’éléphant de temple : prise en trompe des pièces de 5 roupies, apprentissage des langues étrangères pour servir une clientèle de touristes venant du monde entier, remise en mémoire des Dieux de l’Inde, etc. L’après-midi est consacré au sport. Après toute une année à rester sagement immobile devant un temple, ils ont bien besoin de dérouiller leurs articulations et de se refaire de fermes muscles d’éléphants. Et là, ils enchaînent les exercices : extension de la trompe, équilibre sur une jambe, battement des oreilles en rythme, ... Fin de journée, c’est la fête : promenades dans la forêt, chorales de barrissement le soir autour d’un feu de bois, ébauche d’un flirt timide le temps d’un slow … C’est sûr, ce mois va passer très vite mais laissera à tous de merveilleux souvenirs et ils pourront se repasser le film dans leur tête tout au long de cette nouvelle année de service devant les temples.

Françoise Simonot-Lion