Centre d'accueil pour enfants orphelins

Dans la région de Pondichéry (district de Pondichéry et état du Tamil Nadu) un centre d'accueil pour enfants abandonnés a été créé en 1991 par une jeune indienne. Une première maison a été établie pour héberger des garçons dans les faubourgs de Pondichéry. En 2009, une deuxième maison a vu le jour pour accueillir des filles dans un village sis au milieu d’une campagne verdoyante. En 2018, un foyer pour enfants gitans, APRES HOME, est intégré au centre.
L’association française Les Orphelins de Pondichéry soutient ce centre depuis 2005.

lundi 31 janvier 2022

Fête de la République

Le 15 août 1947, l'Inde devient une nation indépendante et le 26 novembre 1949, le pays adopte sa constitution rédigée par un groupe dirigé par Bhimrao Ramji Ambedkar, indien d'origine dalit (intouchable),  

Mausolée d'Ambedkar - sur le front de mer à Pondichéry

 La constitution indienne entre en vigueur le 26 janvier 1950. Le 26 janvier devient dès lors un jour de fête nationale en Inde : le Republic Day.

Tous les ans, durant 4 jours des événements se produisent dans tout le pays. À partir de cette année, le premier jour, appelé dorénavant le Parakram DiwasI ou Jour de la Vaillance, commémorera le 125ème anniversaire de naissance de Netaji Subhas Chandra Bose.

Bose (à gauche) et Nehru (au centre) - Octobre 1937

Si Gandhi est connu pour avoir lutté pour l'indépendance de l'Inde en prônant la non-violence, Bose a lui opté rapidement pour la lutte armée, n'hésitant pas à chercher des supports auprès des ennemis des anglais, notamment auprès de l'Allemagne et du Japon, lors de la dernière guerre mondiale. Alors que dans la lutte pour l'indépendance de l'Inde, la question hindoue / musulmane semblait cruciale pour l'avenir du pays, chaque communauté s'enfonçant dans le radicalisme, Bose, à l'instar de Gandhi militait pour un projet économique et politique exempt de fanatisme.

Le 26 janvier est le jour des parades militaires. Celle de Delhi est bien sûr prestigieuse. Elle s'est déroulée devant Ram Nath Kovind, Président de la République et Narendra Modi, Premier Ministre. Défilé de troupes, survol des forces aériennes, fanfares ont fasciné les foules comme chaque année. 

Mais, pour la première fois, l'hymne préféré du Mahatma Gandhi a été définitivement retiré du programme de la parade. Certes "Abide with me" est un poème écrit au 19ème siècle par un écossais et mis en musique par un anglais. Mais écoutez-le sur youtube ou cliquez sur la vidéo ci-dessous. Il a été joué pour la dernière fois en 2021 par une superbe fanfare. Pompier, peut-être mais magnifique ! Et quelle fanfare !

 



Avec moins de pompe, mais avec autant de fierté pour leur pays, nos petits indiens et indiennes de l'orphelinat ont fêté le Republic Day. Dans chacune des trois maisons, un grand moment a été l'envoi des couleurs.

APRES

Maison des filles

Maison des garçons

 L'hymne indien retentit et on se met au garde-à-vous dans un parfait alignement.


La main sur le coeur (APRES)

Un salut parfait à la maison des filles

Raideur et dignité à la maison des garçons

Ensuite, c'est la fête. Musiques, danses, gymnastique. 

Chez les garçons à Nonnankuppam.





Chez les filles à Palayam.


Dans la maison des petits gitans (APRES).


Les héros de l'indépendance sont présents.

  • Les portraits de Netaji Subhas Chandra Bose (voir plus haut dans cet article) et de Kamarajar, homme politique du Tamil Nadu, qui a milité pour l'indépendance de l'Inde est a été un membre actif du parti du congrès.
Bose (à gauche) et Kamarajar (à droite)
  • Gandhi et les colombes de la paix.

Et on décline les couleurs du drapeau indien partout.

... en éventail ...

... pour habiller une poupée ...

... masquées et indiennes ...

... le kolam à l'entrée de la maison des filles.

Le drapeau de l'Inde est composé de trois bandes horizontales safran (le courage), blanche (la paix et la vérité) et verte (la foi et la prospérité) avec la roue d'Ashoka ("la régénération économique de l'Inde et l'ardeur au travail de son peuple") au centre. 


Françoise Simonot-Lion (et Alice Thomas)

- Quatre heures avant la proclamation de l'indépendance de l'Inde, le premier Président, Rajendra Prasad, a fait un discours radio-diffusé. Vous pouvez lire ce texte remarquable, plein de paix et d'espoir, à cette adresse (en anglais).

- Un portrait intéressant, replacé dans son contexte de Netaji Subhas Chandra Bose se trouve ici (en anglais).

- Une présentation de Kumaraswami Kamarajarpeut être lu ici.

- Les paroles du chant bien aimé de Gandhi, Abide with me, cliquez sur ce lien.

dimanche 30 janvier 2022

24 janvier 2022 - National Girl Child Day

 Comme tous les ans depuis 2008, l'Inde a fêté le 24 janvier la Journée Nationale des Filles (National Girl Child Day). À l'initiative du Ministère de la femme et du développement de l'enfant, cet événement est déployé dans tout le pays et la Ministre, Smriti Zubin Irani, a elle-même tweeté un message pour promouvoir l'objectif de cette journée.

De l'actrice indienne Samantha Ruth Prabhu à UNICEF India, de nombreux indiennes et indiens relaient cette célébration des fillettes sur les réseaux sociaux.


L'objectif de la Journée Nationale des Filles est de sensibiliser la population aux inégalités auxquelles sont confrontées les filles et de promouvoir auprès de tous et, en premier lieu auprès des filles elles-même, leurs droits, l'importance de l'éducation, de la santé et de la nutrition.

L’Inde compte actuellement près de 1,4 milliards d’habitants dont un peu moins de la moitié sont des femmes. Si la femme est très présente dans l’espace public, il subsiste, dans ce pays fortement ancré dans ses traditions, une préférence pour les garçons et il reste encore aux femmes un long chemin pour atteindre une totale autonomie. Pour la très grande majorité d’entre elles, ce n’est que par le mariage qu’elles obtiennent un statut social.  

Le recensement de 2011 a fait apparaitre un sex ratio (rapport entre le nombre d'individu de sexe féminin et le nombre d'individu de sexe masculin) déséquilibré en faveur des hommes. On comptait sur la population totale 946 femmes pour 1000 hommes. Plus inquiétant était le sex ratio de 918 filles pour 1000 garçons  dans la population de moins de 6 ans. Le même recensement montrait d'ailleurs que, dans cette tranche d'âge, la situation s'était aggravée depuis le recensement précédent (927 filles pour 1000 garçons en 2001). Les "Femmes Manquantes" (The Missing Women). C'est par ce terme que l'économiste indien Amartya Sen, lauréat du prix Nobel d'économie a désigné ce phénomène qui est observé plus particulièrement dans les pays d'Asie (Chine et Inde notamment) du Moyen-Orient et d'Afrique. En Inde, la situation varie d'un état à l'autre. 

Ce déséquilibre est très marqué dans les états du nord-ouest, à la population pauvre et peu éduquée, alors que dans le sud, les états du Kerala, du Taml Nadu et le Territoire de Pondichéry font figure de bons élèves. Très tôt, dans ces états du sud sont apparues des initiatives intéressantes comme le Cradle Baby Scheme (Des berceaux pour bébés). Lancé en 1992, ce projet se déroule dans des villes du Tamil Nadu. Il permet aux parents de laisser les bébés filles non désirées dans des dizaines de berceaux vides dans les hôpitaux, les centres d'aide sociale et les bureaux du gouvernement. Pratiquement tous ces enfants peuvent être alors adoptés.

Extrait de The Hindu - 24 juillet 2010

Si cette initiative a permis de sauver de la mort des fillettes non désirées, elle n'a pas pour autant modifié le regard de la société sur les filles. Le terme "non désirée' est toujours présent dans l'esprit.

Aussi, une autre initiative, toujours dans le Tamil Nadu et Pondichéry, a vu le jour. Dans le cas où un couple a donné naissance à uniquement deux filles et si le couple s'engage à ne plus avoir d'enfants, alors, à leur majorité, chacune des filles recevra un pécule qu'elle pourra utiliser comme elle le désire.

En 2017, déjà, cette dernière action avait eu un effet puisque dans les petites classes il y avait à Pondichéry pour la première fois depuis longtemps plus de filles que de garçons. 

Enfin, au niveau national, la campagne Beti Bachao Beti Padhao (Sauvez les petites filles, Éduquez les petites filles) a été lancée en 2015 afin d’équilibrer le sex ratio dans les états où il est le plus défavorable pour les filles par une incitation forte à leur éducation et des actions pour leur santé. Malheureusement, pour l'instant, l'essentiel du budget du projet a été dépensé en publicité et peu d'argent a été utilisé pour des actions concrètes (voir ici).

Logo du programme Beti Bachao Beti Padhao
 

Cet ensemble de mesure et les progrès fait dans certains états en faveur de l'éducation des filles ont, semble-t-il, déjà porté leurs fruits. En effet, en novembre 2021, la dernière enquête nationale sur la santé des familles (National Family Health Survey) menée sur un panel représentatif de la population indienne montrait que le sex ratio total en Inde était de 1021 femmes pour 1000 hommes. avec toujours une inégalité entre états.

Extrait de The Hindu (26 novembre 2021)

Hélas, cette enquête montre qu'il existe toujours un sex ratio à la naissance (nombre de naissances de filles par rapport au nombre de naissance de garçons) défavorable pour les filles. Il ne s'est amélioré que de 919 pour 1 000 hommes en 2015-2016 à 929 pour 1 000 en 2019-2021. La préférence pour les garçons reste encore fortement ancrée dans les familles traditionnelles. 

Pour lutter contre ce problème, il faut éduquer les enfants, en particulier les filles pour leur permettre de gagner en autonomie. C'est le but de la Journée Nationale des Filles. 

C'est ainsi que Alice a reçu cette lettre du Département de la femme et du développement de l'enfant du Territoire de Pondichéry. Dans le cadre de cette journée, sera mené dans la maison des filles de l'orphelinat un programme de sensibilisation sur l'importance de l'éducation des filles, de leur santé et de leur alimentation. Un kit contenant des produits d'hygiène féminine et des barres de céréales sera distribué à chaque fille. Le programme débutera à 15h le 24 janvier et sera accessible via un lien Google Meet.


À l'heure dite, tout est prêt dans la maison de Palayam. Les affiches sont déployées.


L'inauguration de la conférence est suivie à distance avec attention.

Puis des exposés sont faits localement devant les petites.



Enfin, des animations sont proposées dans les locaux du Département de la femme et du développement de l'enfant du Territoire de Pondichéry et suivies à distance par tous les centres d'accueil pour filles sur le Territoire de Pondichéry. Dans ce cadre des pensionnaires de la maison des filles de l'orphelinat ont donné un concert de musique traditionnelle carnatique.


 
 


 

À l'orphelinat, ce n'est pas que le 24 janvier qu'on s'adresse aux filles. Depuis 2008, date à laquelle Alice a ouvert un foyer pour les filles, le maitre mot est "éducation" et "autonomie". Et ce mantra se décline tout au long de l'année : conférences dédiées aux filles, éducation à l'hygiène, activités diverses (musique, danse, ...). Pour préparer leur autonomie future, chaque fille a la possibilité de poursuivre des études aussi longtemps que leurs motivations et leurs capacités le leur permettent. Pour l'année scolaire 2021-2022, 30 filles suivent un cursus soit dans les deux dernières années du lycée, soit pour obtenir une licence voire pour deux d'entre elles pour un master.

Françoise Simonot-Lion

 


jeudi 20 janvier 2022

Pongal 2022

C'est la fin des moissons dans le sud de l'Inde fêtée comme tous les ans par Pongal (voir l'article paru en 2021  "Dans l'Inde du Sud on fâte Pongal" sur ce blog). Comme tous les ans, des messages déferlent sur nos smartphones. 

C'est d'abord de Salem au coeur du Tamil Nadu que nous parvient une belle image de kolam (dessin sur le sol à l'entrée des maisons) ouvre le bal.

Puis, c'est au tour d'Aroul, notre fournisseur de textiles du marché de Pondichéry, de nous faire rêver avec le rite de la cuisson du riz au lait ... Il en profite, d'ailleurs, pour se faire un peu de publicité.

Mais cette vidéo reçue au deuxième jour des festivités est certainement la plus charmante. Quand Léonard de Vinci rejoint les traditions indiennes millénaires ... ça laisse rêveur.

L'origine de la fête de Pongal n'est pas propre à une religion même si l'hindouisme y a mis fortement son empreinte. C'est un rite essentiellement lié au cycle des saisons et des récoltes. Mais en Inde, peut-on réellement s'affranchir d'une religion ? C'est ainsi que dans ce pays, chaque communauté religieuse va intégrer Pongal à ses propres croyances et rites. 

L'année dernière les fêtes se sont déroulées modestement en raison de la pandémie de Covid-19. En 2022, la situation sanitaire est plus favorable et au Tamil Nadu, comme à Pondichéry, les manifestations de Pongal ont été autorisées. Des jauges ont été établies pour limiter le nombre de participants lors des événements publics, des conseils ont été donnés à la population et la police a largement été déployées dans les villes pour assurer le respect des consignes.

Le 13 février, dans les jardins de sa résidence (Raj Nivas), la Lieutenant Gouverneur recevaient les membres du gouvernement ainsi que les leaders de l'opposition.

La fête dure quatre jours. Elle marque le début d'un nouveau cycle dans le calendrier tamoul. Aussi, au premier jour, on brule ses vieux vêtements. Ce jour-là, les hindous célèbrent Indra, le dieu des pluies. Le lendemain, jour où le soleil entre dans la constellation du Capricorne, est dédié au dieu hindou Surya. Tôt le matin, on cuit alors  riz au lait. Attention il faut que le mélange de riz, de lait et de sucre déborde abondamment et plusieurs fois (Pongal = déborder en tamoul) et on partage un repas avec les dieux, la famille et les amis. Auparavant, maisons et étables sont nettoyées, repeintes, décorées de Kolams. Les portes sont encadrées de feuilles de bananier.

Le troisième jour est dédié aux vaches et taureaux. Les animaux sont décorés de guirlandes de fleurs, leurs cornes sont peintes. On leur offre un repas spécial et des bananes. Mais le clou de la journée est Jalikattu, une sorte de corrida, sans mise à mort du taureau. Les taureaux sont lâchés. L'enjeu pour un participant consiste à s'accrocher à la bosse du taureau le plus longtemps possible et à tenter d'arrêter l'animal. Il semble que le domptage de taureau soit une pratique très ancienne dans le sud de l'Inde. En effet, des fresques rupestres, datant probablement d'avant notre ère, ont été trouvée dans le Tamil Nadu (mentioné par l'historien de l'art et archéologue K.T. Gandhirajan).

Extrait de The Hindu "Bull-taming in Tamil Nadu’s ancient rock art" (19/01/2017)

 Ces courses se déroulent dans tout l'état mais celles organisées dans la région de Madurai sont les plus prisées. En particulier, le Jalikattu de Alanganallur rassemble une grande foule. Cette année, le confinement imposé durant le week-end dans tout l'état a décalé la manifestation, prévue le dimanche 16 janvier, au jour suivant. En regardant cette vidéo, vous allez vibrer au rythme des taureaux déchainés et des prouesses des vaillants "cow-boys". Il faut noter que les défenseurs des animaux s'opposent à cette pratique tandis que dans tout le Tamil Nadu, on revendique bien haut cette tradition. La saison de Pongal fait chaque année la place à d'animées controverses dans la presse.

Crédit photo : The Wire

Lors du dernier jour de Pongal, on se réunit en famille ou avec des amis.

Bien entendu, à l'orphelinat, on fête Pongal. Cette année, tous les enfants étaient réunis dans la maison des garçons. 

 

 

Dès 9 heures du matin, les voitures de l'orphelinat déversaient les filles de Palayam et les petits gitans Narikuravars. Le festival a démarré à 10 h 30 et s'est terminé vers 3 h 30 de l'après-midi après une photo emblématique des 300 enfants et des 47 membres du personnel.

De nombreux stands étaient répartis dans la cour. Comme à une fête foraine on pouvait jouer à la lotterie, au bowling, au lancer d'anneaux, au lancer de flêchettes, etc.








 

D'autres étals proposaient des sucreries, des boissons, du pop-corn, des beignets, de la crème glacée, des salades de fruits, des samosas, ...




 

Et le clou des animations étaient les stands de peintures sur corps et visages ... Où l'on peut découvrir les talents artistiques de Maran ...

Les enfants ne sont pas en reste pour se faire une frimousse colorée.

Et même Alice se laisse tenter par 3 coccinelles sur la joue.

Pour accéder à ces stands et s'offrir, jeux, boissons, nourriture, ... chaque enfant s'était vu remettre 3000 roupies en billets de Monopoly. Choisir et comment dépenser son argent a été une bonne expérience pour eux.

Alice nous dit "The air was filled with joy, fun and folic ...it was like a village festival" ("L'air était rempli de joie, de rires et de fantaisies ... c'était comme une fête de village").




Alice et Maran

Le dernier jour, le riz au lait a été préparé dans chacun des foyers. Les garçons de Nonankuppam ont respecté la tradition scrupuleusement.

Décoration de la cour avec des feuillages (et un Père Noël oublié sur un mur)

Réalisation des Kolams (en principe, dessinés par des femmes)

Et enfin, préparation du riz au lait.





Happy Pongal Alice !



Françoise Simonot-Lion (et Alice Thomas)